Game design 3 : Level design

— Différents joueurs, un seul niveau
— Un joueur impliqué
— Un niveau lié aux mécaniques
— Quelques préceptes
— Établir un chemin naturel
— L'exemple du tutoriel
— Workshop : création d'un niveau pour Mario Kart 64

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Différents joueurs, un seul niveau

Lorsque l'on fait du level design, il faut penser aux différentes catégories de joueurs qui vont y jouer. En effet, on peut cibler une catégorie de joueurs, mais celle-ci restera bien large quoi qu'il arrive. On peut distinguer des types de joueurs : ceux plus occasionnels et ceux plus acharnés vous paraîtront deux catégories évidentes, mais elles sont plus complexes que cela. Chez Magic The Gathering, ils ont identifié trois catégories de joueurs : Timmy, Johnny et Spike. Chacune de ces catégories est divisée à nouveau en différentes catégories, qui peuvent être mélangé. On arrive sur un nombre de profils extrêmement varié. Je vous invite à lire l'article de la bibliographie pour en savoir plus à ce sujet.

On a donc différents types de joueurs. Par exemple, un joueur explorateur va vouloir découvrir le monde et ses secrets, tandis que celui qui aime plus l'action va se déplacer beaucoup plus vite sans prendre le temps de découvrir tout ce que vous avez intégré dans votre jeu. Récompensez les joueurs qui explorent et permettez aus joueurs rapides de profiter du jeu. En plus de ces différences apparentes, il y a aussi le niveau d'implication et ses capacités au sens propre. Récompensez les joueurs doués sans négliger les moins bons. Rappelez-vous à chaque fois que vous devez plaire à vos joueurs. Évidemment, certains jeux ne récompensent pas les joueurs qui ne sont pas doués, mais ce sont généralement des jeux de niche, ou d'autres mécanismes rentrent en jeu.

Un joueur impliqué

Un bon level design doit permettre au joueur de comprendre sa progression. Chaque action qu'il fait dans l'univers doit lui apparaître comme sensé. Faites qu'il se sente en permanence en train de faire avancer l'histoire. Les quêtes dites «fedex» où il faut aller chercher un objet pour un personnage sans raison particulière sont généralement ennuyantes. Le joueur doit comprendre quand ils réussissent ou ratent, et être sûr de comprendre comment faire mieux la prochaine fois. Appuyez-vous sur des feedbacks clairs pour cela.

Les détails peuvent perturber le joueur, d'autant plus si des éléments sont interactifs et d'autres non. Il faut clairement que le joueur puisse identifier les différences simplement pour qu'il ne passe pas un temps fou à chercher des éléments (à part si cela fait partie de votre gameplay…). Le meilleur moyen d'arriver à cela est en faisant une cohésion complète avec la partie artistique, en donnant des indications visuelles directement dans le design. Portal et Mirror's Edge sont de très bon exemple de ceci.

Dans un level design idéal, le joueur est sans arrêt confronté à des obstacles insurmontables, dont il triomphe en utilisant des techniques qu'il ne pensait pas possible. Ainsi, ils peuvent se sentir définitivement héroïques. Le but de level design est de donner cette illusion au joueur.

Un niveau lié aux mécaniques

Pour avoir un level design vraiment efficace et agréable, il doit évidemment être intrinsèquement lié aux mécaniques. Ainsi, on peut se poser les questions suivantes :

— est-ce que mes mécaniques changent de manière significative en fonction du niveau ?

— est-ce que ces mécaniques redeviennent palpitantes dans un nouveau niveau ?

En essayant de garder des mécaniques qui ont la possibilité de s'adapter en fonction du level design, on gagne sur plein d'aspect : du temps, déjà, mais on augmente également l'impression de maîtrise du joueur.

Quelques préceptes

— Il faut maintenir la vision du jeu exprimée par le game designer. En cas de doute, demandez des précisions supplémentaires dans le GDD.

— Soyez sûrs des éléments dont vous disposez (assets graphiques, scripts, éléments de gameplay, etc.), imprégnez-vous de ceux-ci, jouez avec, testez-les. Si vous pensez qu'ajouter des éléments puisse rendre votre niveau meilleur, discutez-en avec l'équipe.

— Si vous vous amusez en créant votre niveau, il y a de grandes chances que les joueurs s'amusent aussi (excepté si vous êtes très sadique).

— Prévoyez. Ne commencez pas votre niveau sans avoir une idée dans laquelle vous allez. Tester sur papier est plus rapide et permet de gagner du temps.

— Diversifiez vos niveaux. Cela paraît évident, mais il est toujours bon de le rappeler. Si les joueurs explorent toujours les mêmes types d'environnements en combattant les mêmes types d'ennemis, ils vont s'ennuyer.

— Prenez en compte les différents types de jeu des joueurs. Récompensez les joueurs audacieux tout en offrant des solutions alternatives pour les plus prudents. Offrez différentes solutions pour que les joueurs ne soient pas bloqués. Faites comprendre au joueur prudent qu'il peut essayer la solution risquée en rejouant, faites comprendre au joueur audacieux qu'il peut s'améliorer.

— Récompensez l'exploration et la découverte. Les joueurs aiment les secrets et se sentent fiers de découvrir des endroits cachés. Si un joueur se demande «et si…?» et que votre jeu répond «et oui, tu peux !», tout en gardant la vision du jeu, vous avez gagné. Les joueurs se sentent récompensés quand ils découvrent une solution qui a l'air difficile, même si elle ne l'est pas.

— Faites attention au rythme. Ne dévoilez pas tout trop vite, tout en gardant les joueurs intéressés. Les assets graphiques forment une bonne chose à dévoiler progressivement au joueur pour le garder intéressé.

— Défiez vos joueurs. Faites attention à la courbe de difficulté pour offrir un challenge approprié. Si votre niveau est trop dur par rapport à la progression, vous pouvez alors le simplifier, le déplacer, rajouter des limitations spécifiques (interdire de toucher les murs, de tirer sur certains types d'ennemis)… Ce n'est pas non plus un mal de mettre des niveaux assez simple après des niveaux durs, pour laisser le temps au joueur de respirer.

— Mettez de vous dans vos niveaux. C'est là où vous pourrez faire valoir votre originalité. Jouez aux jeux qui ressemblent à ce que vous faites, apprenez leurs défauts et leurs qualités. Inspirez-vous, sans recopier.

— Les joueurs ne lisent pas. Faites comprendre ce qu'il faut faire. Les longs textes ne sont lus que par une très faible minorité. Même un petit texte est souvent ignoré.

— Faites bien attention à ce que vous voulez montrer au joueur ! Son regard ne se posera pas forcément là où vous vous attendez. Playtestez !

— Soyez sûr d'être au niveau des attentes des joueurs : réalisez-les. Ne promettez pas quelque chose si vous n'arrivez pas à la hauteur de vos promesses, la déception se créerait. Quand vous dévoilez de l'inattendu, soyez sûr que c'est le bon moment pour le faire, ne gaspillez pas ces opportunités. N'hésitez pas à utiliser des contrastes pour surprendre.

— La difficulté doit être équilibrée entre le moins bon et le meilleur joueur, avec le niveau median. Vous devez faire ça en playtestant, mais faites bien attention à votre cible.

— Les joueurs ont déjà des capacités au préalable avant de jouer à votre jeu. Les plus expérimentés vont les utiliser dès le début du jeu, et vous pouvez aider les moins connaisseurs en expliquant ces astuces au fur et à mesure du jeu, lorsqu'ils progressent vers des niveaux plus avancés. Vous ne pouvez évidemment pas baser la solution sur des astuces que vous n'avez pas apprises au joueur, mais vous pouvez les intégrer en tant que solution alternative. Ainsi, les joueurs expérimentés se sentiront récompensés en jouant.

— Ne sous-estimez pas et ne surestimez pas ce que le joueur obtient comme objets dans les niveaux précédents pour le niveau suivant. Cela risque de complètement détruire votre vision du niveau.

— Vous créez l'adversaire du joueur. Vous devez vous baser sur ses faiblesses pour lui faire peur, tel un prédateur. C'est ce qui donnera plus de challenge au jeu, le rendra plus fun et plus gratifiant.

— PLAYTESTEZ. Les playtesteurs n'ont jamais tort.

— Les petits détails sont ce qui rend un niveau fun. Rajoutez-en, continuez à ajuster le niveau jusqu'à ce qu'il soit fun.

— Créez une «mind map» pour explorer les différentes possibilités du niveau et les anticiper. Celle-ci pourra et sera sûrement améliorée après playtest.

— Créez des points de repère pour votre niveau.

— Réfléchissez à ce qui rend votre niveau mémorable.

— Rien de tout ceci n'est obligatoire, mais tout cela peut vous être utile.

Établir un chemin naturel

Il y a des techniques qui utilisent le subconscient pour établir un chemin naturel pour le joueur. Parmi ces techniques, on trouve :

— la lumière, l'œil humain est naturellement attiré vers elle par contraste

— les mouvements, l'œil va regarder là où il y a des choses qui bougent

— la caméra, qui va forcer une direction pour le joueur

— la couleur, en effet, si une couleur est utilisée de manière constante pour une action, elle devient remarquable (Mirror's Edge)

— le son, la curiosité nous poussant à aller regarder d'où cela vient

— les flèches, car c'est leur but

— la composition picturale, qui grâce à ses règles de lignes directrices et points de fuite vont diriger l'œil

— l'affordance, qui est la faculté d'un objet à exprimer son utilité par sa forme

L'exemple du tutoriel

Miyamoto explique comment il a designé le monde 1-1 de Super Mario Bros.

Un bon tutoriel est un tutoriel qui ne se remarque pas. Dans certains jeux, le joueur va arriver et se dire "oh flûte, le tutoriel…". Le but est qu'il commence le jeu, et qu'il puisse faire directement des actions dans un environnement non dangereux. Quand le joueur apprend les mécaniques de base du jeu dans des conditions réelles, c'est là que le jeu est intéressant.

Parmi les options possibles, il est possible de désactiver toutes les touches à part celles que l'on veut enseigner. Ainsi, le joueur est obligé d'appuyer sur la bonne touche pour continuer le déroulement du jeu, il voit l'action associée et aucun doute n'est possible. Si texte il doit y avoir, il doit être court et réduit à son strict minimum. Les joueurs ont la fâcheuse tendance à ne JAMAIS lire ce que vous écrirez.
Le pire qu'il puisse arriver est une longue série de textes sans démonstration. Il faut toujours que le joueur comprenne ce qui est associé à une touche, à un texte, à une action. Si vous écrivez "vous pouvez sauter avec X", faites immédiatement une action liée à celle-ci.

Mais il n'est pas suffisant de le montrer une fois. Si je vous explique une formule de mathématiques, vous ne la retiendrez pas instantanément. Il faudra que je vous la répète. C'est le même schéma ici : faites que votre joueur saute plusieurs fois. Dans différents contextes peut-être, avec d'autres mécaniques peut-être, mais répétez. Il est obligatoire que toutes les actions apprises soient répétées tout au long du tutoriel.

Certains jeux «valident» l'action, et il n'est pas possible de recommencer. De ce fait, certaines mécaniques sont oubliées par le joueur. Laissez-leur l'opportunité de recommencer, de s'en souvenir ! Le meilleur moyen de se rappeler de quelque chose, c'est de le faire soi-même. C'est même comme cela que fonctionne Epitech ! Soyez sûr que le joueur a réellement compris ce qu'il vient de faire et qu'il est capable de le refaire.

Workshop : création d'un niveau pour Mario Kart 64

Aujourd'hui, nous allons créer un niveau pour Mario Kart 64. Pour ce faire, basez-vous sur votre jeu de plateau : vous y avez étudié les mécaniques, vous pouvez maintenant faire un niveau qui les applique. Réfléchissez à comment le rendre fun, et pourquoi il le serait, puisque vous ne pouvez tester que sur papier. Vous pouvez aussi l'aborder sous cet angle : est-ce qu'il y a quelque chose que vous auriez aimé voir dans ce jeu ? Eh bien, créez-le ! En y réfléchissant sérieusement, vous découvrirez peut-être des problèmes qui sont la raison pour laquelle ça n'a pas encore été fait. Laissez parler votre créativité et surprenez-vous !